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c
c
c
Je ne connais pas ces
gens. Pourquoi suis-je
le dépositaire de
cette confession ?
Je l'ignore.
Les prénoms sont-ils
réels ? Je l'ignore
également mais
ce sont ceux qui
m'ont été donnés...

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(Psychanalyse . la mère)

Céline
cage
c
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Caroline, la mère de
 Céline, était
 chercheuse médicale.
 
Ses recherches
 portaient sur
 l'utilisation
 d'embryons humains
de quelques cellules
à des fins
 thérapeutiques... 
Ces travaux sont très souvent condamnés par les «religieux», mais pas seulement. Caroline, aujourd'hui décédée, a totalement perdu pied. Elle a abusé de sa position, du matériel mis à sa disposition, elle a commis des délits. Un deuil insurmontable lui a fait oublier la raison et l'a poussée à commettre ces actes illégaux que certains pourraient considérer comme absolument monstrueux, doublement, triplement monstrueux. Le débat en ce sens, reste ouvert. «L'affaire» a été étouffée, couverte soigneusement car elle ne pouvait être ignorée d'aucun des collègues de Caroline ; camouflée donc, par les autres chercheurs, devenus complices et, par la même, coupables absolus, responsables devant la science. Ils ont eu à choisir entre le silence sur ces agissements et l'arrêt, la ruine, de ces travaux si précieux en termes de vies à sauver. Ce choix est une torture de chaque instant. Mortel, infiniment vénéneux. L'équipe sera définitivement hantée par cette décision impossible et maudite. Mais tous, tous ont choisi de dissimuler les agissements impardonnables de Caroline. Pour la recherche, pour la science.
Caroline s'est trouvée un complice : Théophile, son ami de toujours, l'éternel soupirant malheureux et silencieux, chercheur lui aussi dans ces domaines. Après la mort de Caroline, pour tenir sa promesse, il poursuivra cette folie jusqu'à son accomplissement.
Caroline était mariée à Elmer. Depuis leur première rencontre, en 1980, ils avaient l'un pour l'autre un amour immense. Ils vivaient une passion charnelle jamais apaisée et une communion d'esprit intense. Six ans plus tard, ils eurent une petite fille, Céline.
Elmer était photographe. Depuis ses débuts, il ne travaillait que sur le portrait. Il avait toujours sur lui son appareil photographique et il proposait régulièrement et toute la journée, à des amis ou à des passants anonymes de les photographier. Différents lieux, différents modèles, différents éclairages, en studio ou en extérieur, mais, toujours ce même cadrage, plutôt rapproché, le visage occupant presque toute la surface du tirage. Il obtint quelques bourses pour continuer ce travail de qualité, réalisa des livres, collabora à des expositions assez prestigieuses, travailla même pour la police, où il mettait ses connaissances au service d'un projet d'anthropométrie expérimentale. Il eut bientôt des centaines puis des milliers de portraits qu'il stockait sur des micro-films puis, plus tard, numériquement. De plus, il récupérait de vieux portraits photographiques dans de vieux albums achetés dans les vides greniers, chez des photographes de quartier «spécialisés» dans les photos de bébés, de première communion, de mariage... comme tous les photographes de quartier. Tirages ou négatifs, il restaurait, retravaillait puis numérisait ces portraits, ré-ajustait les cadrages pour les ajouter à son invraisemblable collection. Il réalisa des expositions personnelles, suivant toujours un même modèle d'installation : des tirages au même format standard : «18X24», disposés orthogonalement, en lignes et en colonnes, recouvrant tous les murs des salles, parfois le plafond, chaque portrait séparé des autres à gauche et à droite par 18 cm, au dessus et en dessous par 24 cm. Des thèmes étaient proposés : «portraits de femmes», «portraits d'hommes», «portraits à grimaces», «portraits d'enfants».
Elmer plaisantait souvent avec Caroline, toujours cette même plaisanterie étrange : «Vous consacrez votre vie au sauvetage possible, même d'une seule vie, moi j'accumule les cadavres, présents, passé, ou futur, connus, reconnus, ou inconnus. Une vie vous est plus précieuse que tous les trésors de l'univers, cette vie pourra devenir la raison de votre existence. Moi, j'épingle l'anonymat, le portrait d'un passant fera évoluer celui ci, un très furtif instant, de l'état de «quidam» à celui de «quelqu'un». La multitude ne lui laissant aucune chance d'être distingué et de rester «quelqu'un» plus longtemps. Furtif et dérisoire, englouti par le temps, englouti par le nombre. Votre passion est la vie, la mienne semble l'être seulement. Car si vous êtes la vie, alors je suis la mort. C'est pour ça que je vous aime, c'est pour ça que vous m'aimez».
Caroline était médecin. C'était une chercheuse très douée. Ses travaux sur les cellules souches sont célèbres et reconnus. Les résultats de son équipe sont très prometteurs, plus qu'encourageant. Certains même, de ceux-ci sont au delà du prometteurs. Ils sont aboutis. Gardés secrets mais aboutis. Entre autres succès, Caroline et son équipe sont parvenu à interrompre à volonté, sans les congeler ni les léser d'aucune façon, la multiplication des cellules souches embryonnaires totipotentes, puis, à relancer, après intervention si nécessaire, cette multiplication. Ils étaient capables, en outre, sans les altérer le moins du monde, de «doper» ces cellules, cette multiplication, de ramener les échecs à un pourcentage ridicule. Des molécules, des traitements fiables à certaines maladies génétiques étaient prêts à être rendus publiques. Donner la vie à un clone viable était possible ! Ils l'avaient fait ! Ces faits, déjà sujets à polémiques, s'ajoutèrent à la paralysie de ses collègues et amis chercheurs quant à la révélation au monde des actes prohibés de Caroline. Elle était, pourtant, très engagée dans son travail. Caroline était une femme magnifique. Sauver une vie était aussi important que de sauver toutes les vies. Caroline était très belle. Rayonnante, éblouissante. Elle s'était servi de ses propres ovules pour certaines de ses recherches. Elle s'était servie aussi de certaines de ses propres ovules fécondées in-vitro par des spermatozoïdes de Elmer. Elle s'en servait pour des expériences sur ces «cellules souches totipotentes». Elle avait outrepassé les «interdits», sûre de son fait, sûre de son combat. Des vies allaient être sauvée, des souffrances apaisées. Une de ses raisons de vivre semblait prête à éclore, à rayonner sur le monde, sur la vie.
Au jour où j'écris, Céline, sa fille, doit avoir une vingtaine d'années.
Qu'est-elle devenu ? Où est-elle ? Où est son enfant ?
Céline était une merveilleuse petite fille. Elle réunissait miraculeusement la beauté presque surnaturelle de sa mère et celle, intense, de son père. Avoir des parents si brillants n'a pas submergé l'intelligence raffinée de Céline. Une personnalité unique, une originalité certaine. Elle écrivait des essais, des nouvelles, toujours cachés aujourd'hui, mais pour les quelques rares qui ont pu en lire des fragments, d'une acuité bouleversante. Selon ceux qui l'ont côtoyée, Céline était une adolescente, une jeune femme étourdissante. Une enfant choyée, aimée, n'ayant toujours connu que l'amour absolu de ses parents l'un pour l'autre, et celui, sans fond, que son père et sa mère lui portaient.
Théophile connaissait Caroline depuis son enfance. Il la vénérait. Caroline avait une confiance absolue en Théophile. Elle n'ignorait rien de la passion qui le hantait, de ce culte qu'il lui vouait. Elle lui avait pourtant rapidement signifié qu'il n'avait rien à attendre d'elle dans ce type de relations amoureuses. Il avait entreprit les mêmes études qu'elle, certainement pour suivre son amour. Très brillant, il avait cependant, sacrifié toutes ses ambitions à son adoration muette et douloureuse de Caroline. Dès qu'elle l'avait pu, elle l'avait choisi comme adjoint dans tous les postes qu'elle avait occupés. Théophile était devenu le confident et Caroline ne lui avait jamais rien caché : ses doutes existentiels d'adolescente, ses désirs, ses amours, ses émois érotiques... Théophile était à la torture. Délicieuse torture.
Elmer heureux dans son épanouissement professionnel, amoureux et familial, n'avait qu'une «flétrissure», il était violemment agoraphobe et sujet au vertige. Il fuyait comme la lèpre les parkings vides, les déserts, les pays de montagne...
Caroline, amoureuse et espiègle, se moquait souvent gentiment de cette faiblesse de Elmer. «Peur de la page blanche comme tous les artistes ? Peur des murs vides ? Peur de l'absence de quelqu'un ? De l'absence de qui ? De votre maman ? Peur d'être vu ? D'être surpris dans votre vide abyssal ? Vous accumulez les portraits. Créez vous cette foule pour vous protéger ? Est-ce surtout pour combler ce vide, ce creux ? Ou ce manque ? Peut-être que ce qui vous terrifie, c'est d'être vue en train de mater, au travers de votre objectif comme au travers d'un trou de serrure ? Peut-être que, dans ces endroits vides, vous ne pouvez plus mater car «mater», c'est aussi être caché, n'est ce pas mon chéri ? Pourrait-on, seulement, appeler cela «lâcheté» ? Moi, j'aime bien la montagne. J'aime le ski, les ballades. Je ne peux jamais en faire. Où faudrait-il que je parte seule ?». Mais Elmer ne se laissait pas faire «Vous vous moquez cruellement ! Encore et encore. Mais comment pourrais-je vous le reprocher, amour de ma vie. Mais n'oubliez pas que cette phobie, cependant, c'est surtout celle du vide, le vertige... ». Et Caroline, mutine : «Et puis j'aime Étretat. Mais, bien-sûr, il y a ces falaises, si hautes et surtout si... désertes...».
Céline grandissait, elle venait d'être majeur. Elle habitait toujours avec ses parents. Comment se séparer d'êtres aussi attachants ? Pour rester le plus possible dans cette maison, elle poursuivait ses études de littérature par correspondance. Elle avait peu d'amis de son age. Elle les trouvait beaucoup trop superficiels ! Si «jeunes» ! Elle ne voyait finalement que les amis de ses parents qui d'ailleurs voyaient peu de monde. Elle était heureuse.
Invité régulièrement par Caroline, Théophile venait s'imprégner du bonheur cette maison. Et en souffrir.
Elmer, un jour, par défi autant que par jeu, mit sur la table deux réservations pour une excursion en haute montagne, dans les Alpes.
«Elmer, mon amour, pourquoi faites vous cela ? Vous n'allez pas du tout apprécier ce voyage ! Pourquoi vous mettre en situation dangereuse ? Pourquoi souffrir ?»
«Parce que je vous aime. Parce qu'il n'est pas question que quelques chose me reste interdit et parce que ma vie est à vous !»
«Avez vous bien réfléchi à l'accident possible ? Est-ce-que je mérite toute cette souffrance ?»
Le départ fut pris pourtant. Le premier jour de randonnée, Elmer était fébrile, tétanisé. Ils avaient un guide pour les accompagner, inquiet de l'état de Elmer. Caroline était rayonnante, mais inquiète aussi. «Elmer, n'ayez pas peur, voyons ! N'ayez aucune crainte, ne regardez pas en bas surtout, cela peut être dangereux, vous savez, il y a au moins 150 mètres à pic !». Le deuxième jour de l'excursion, Elmer paniqua, perdit pied et fit une chute de 200 mètres dans un ravin. Caroline et le guide, terrifiés, prévinrent les secours et descendirent au plus vite pour trouver le corps de Elmer. Ils le retrouvèrent déchiqueté, ses viscères étalés sur les rochers, son crâne éclaté. En proie aux plus grands désordres, Caroline se précipita en larme sur cette masse de chair sans vie, elle barbouilla son visage des entrailles de son amour perdu, voulu en manger. Le guide effrayé, voulut la calmer, apaiser sa folie. Caroline au comble du délire, noyée dans ses cris d'animal blessé, se réfugia sur son épaule, sanglotante, puis elle lui arracha furieusement ses vêtements. Elle s'empala sur lui. Il la prit sur les tripes encore chaudes, dans les neiges éternelles. Plus tard, le guide abasourdi ne pouvait plus parler. Ils attendirent les secours. Ayant, semblait-il, totalement perdu la raison, Caroline chantonnait en jouant avec les morceaux de chair. Les secours arrivèrent, emmenèrent tout le monde à l'hôpital. Puis, tout alla très vite. Le guide, toujours choqué, toujours muet, fut raccompagné chez lui où sa femme, très inquiète, le reçut et le coucha. Caroline, qui était médecin et qui semblait avoir retrouvé son sang froid et toute sa tête, après avoir expédié les démarches et les autorisations d'inhumation, rentra, à sa demande, rapidement chez elle. Là, elle raconta brièvement, froidement à Céline, l'accident, le décès de Elmer. Abandonnant Céline à son désespoir, elle repartit, la laissant sans nouvelle pendant dix jours.
Au laboratoire où elle travaillait, Caroline cacha le drame aux autres. Comme elle partait souvent la dernière, personne ne fut étonné de ne pas la voir repartir ces jours là. Le soir elle alla chercher une poche de sang, y préleva quelques cellules qu'elle mis dans un bain nourricier. Elle fit venir Théophile, lui raconta son séjour dans les Alpes dans les moindres détails, lui fit part de ses intentions et du rôle futur qu'elle lui confiait. Celui ci pleura longuement, silencieusement, tout à sa douleur ambivalente de la disparition du rival blasphémateur et de celle, future et annoncée, de sa déesse. Anéanti par l'atrocité ambivalente, elle aussi, de la tâche qui lui revenait.
«Je m'occuperai de toutes les manipulations, de l'aspect financier aussi. J'écrirai une lettre que vous lui donnerez en même temps qu'une enveloppe qu'elle devra envoyer, une fois tout accompli, au destinataire inscrit sur celle ci. Je vous enverrai mes instructions quant à cette ultime faveur que j'exige de vous. J'ai toujours eu beaucoup d'affection pour vous, Théophile, mais, faites vous une raison ! Vous n'avez jamais eu mon cul et vous ne l'aurez, semble-t-il, jamais.»
Huit jours plus tard, un coursier apporta à Théophile un réceptacle scellé, rempli d'azote liquide et trois enveloppes. La première lui était adressée, la seconde était pour Céline et la troisième devait lui être confiée pour «après». Pendant ce temps, Caroline avait appelé Céline à leur domicile pour s'excuser de son silence si long, pour lui dire de venir la rejoindre au laboratoire, parce qu'elle pouvait maintenant, lui dire toutes les choses. Céline, déchirée d'inquiétude, après ces dix jours de silence, se précipita. Mais, en même temps, Caroline rentra à son domicile par un autre chemin. Une fois sur place, elle s'aspergea d'essence et s'immola par le feu dans son jardin.
Désespérée, Céline, ayant appris que sa mère était partie une heure avant son arrivée, retourna chez elle au plus vite. Là, elle trouva la police, les pompiers, plusieurs ambulances et Théophile.
La police lui annonça le suicide de sa mère, lui fit signer des trucs et tout le monde partit.
Céline, totalement assommée, traînait dans la maison vide. Un notaire vint la voir pour lui faire signer les papiers de la succession. Tout avait été soigneusement préparé, et tout était en règle. Théophile, après avoir ranger le réceptacle scellé dans la chambre froide de la maison, resta seul avec elle, gris et silencieux. Parfois il se reposait sur le tapis du salon. Céline souvent, s'enfermait dans sa chambre et restait là, des heures, des jours, dans l'obscurité.
Ils sont restés trois mois, à errer dans cette maison sinistrée. Parallèlement, semblant s'ignorer. Ils se nourrissaient à l'aveuglette, d'un peu n'importe quoi, la maison était remplie de victuailles. Ce fut Céline qui, la première rompit le silence :
«Et toi, tu es qui ? Tu traîne ici depuis des mois ! Pourquoi ? Moi, je suis chez moi, ici ! Je souffre comme une malade de la disparition sismique de mes parents ! Je ne sais plus qui je suis, je ne sais plus vraiment où je suis et je ne sais plus où aller. Mais toi ! Je sais juste que tu restais agrippé à ma famille comme une espèce de moule souffreteuse ! Je sais que tu as toujours voulu sauter ma mère mais que tu n'a jamais pu le faire ! Alors, qu'est-ce-que tu fout là !! Ma mère s'est faite cramer dans la pelouse, mon père s'est explosé sur les rochers, alors, qu'est ce que tu attends ? Tu crois que je vais me blottir dans tes bras ? Que je vais m'offrir à toi, consolateur inespéré ? Tu peux te branler mon pote !!»

«Qui je suis ? Qui je suis, moi ? Je suis «l'ultime accomplissant», le Judas condamné ! Absolument maudis ! Mais sachant désespérément que lui seul, a entre ses mains l'ultime clé de la transcendance du Christ ! Le dernier et le premier acteur de la tragédie ! L'ultime sacrificateur et l'ultime sacrifié !»
«Oh là, oh là, STOP ! On est pas au théâtre ! Dis moi quel est ton rôle, exactement, dans cette histoire de malades ?»
«Caroline m'a remis une lettre pour vous. J'attendais juste que vous vous manifestiez, que vous soyez prête à la lire.»
Céline décacheta la lettre :
«Ma chérie, ne me pleurez pas, j'en suis indigne, je suis une ignominie. Je suis responsable de la mort de votre père. C'est moi qui, par un orgueil criminel, par mes sarcasmes répétés, l'ai poussé à aller au devant de sa mort. Lui disparu, j'ai perdu le droit d'être vivante. Ma vie n'a plus de sens. Poussée par mon amour pour lui, par cet amour total que j'avais pour lui et poussée par cet orgueil mille et mille fois coupable, j'ai commis cette monstruosité qui m'a fait tirer vers le fond de l'infamie ce pauvre Théophile et m'amène dans cette lettre à vous y entraîner aussi. Céline, vous êtes l'être vivant que je chéris le plus au monde, vous le savez ! Pendant ces dix jours où vous ne m'avez plus vue, j'étais au Laboratoire, dans les pièces «réservées», c'est à dire dans mon laboratoire privé. Il y a vingt et un ans, cinq embryons ont été conçus «in Vitro» à partir de mes ovules et des spermatozoïdes de votre père. Il ont été créés en même temps que vous mon amour, puisque vous étiez un de ces cinq là. Vous seule avez été implantée dans mon corps, les autres, trois masculins et un féminin, ont été congelés après deux divisions, c'est à dire, une fois composés de quatre cellules. J'ai récupérer un des masculins. Parmi les quatre cellules de cet embryon, j'en ai isolé une. J'ai ôté son noyau pour le remplacer par un autre de votre père, récupéré dans un échantillon de son sang que j'avais conservé. Cette cellule s'est divisée puis re-divisée. J'ai répété cet acte deux autres fois, avec les autres embryons masculins. Ces cellules sont viables. Ces embryons peuvent tous devenir un foetus puis un superbe bébé, jumeau parfait de Elmer, une fois que Théophile aura implanté l'un d'eux dans votre utérus.
Vous devez faire cela pour votre père, pour moi et pour vous. Dans mon labo privé, il y a tout le matériel nécessaire à cet opération. Trois essais d'implantation sont donc possibles. Le féminin a été détruit au départ. Quand une de ces trois grossesses possibles sera bien installée, les autres embryons seront tous détruits. Vous voudrez faire cela, je le sais, car vous êtes ma fille. Vous avez mon orgueil, ma détermination et ma folie.»
Céline, anéantie, s'enferma dans l'obscurité de sa chambre. Elle ne ré-apparut que trois jours plus tard.
Théophile lui dit alors : «Maintenant que vous savez tout, viendrez vous avec moi dans les pièces «réservées» du laboratoires ?»
«Oui»
Deux jours seulement furent nécessaires pour l'implantation. Puis Céline resta enfermée là, entourée des soins attentifs et jaloux de Théophile pendant trois mois, temps nécessaire pour que les probabilités de vie du bébé soit suffisamment grandes. Bien sûr, toute l'équipe du Laboratoire, avait appris les drames et découvert la présence permanente de Céline dont Théophile interdisait farouchement toutes approches. Il leur dit lui même, crânement, les raisons de cette présence et tous les actes qui avaient été accomplis, en les mettant au défis de révéler quoi que ce soit.
Quant tout fut réalisé, Théophile s'adressa à Céline :
«Il sera votre fils puisque vous le porterez, votre père puisqu'il sera son double parfait, votre mère par l'ovule originelle et votre «frère potentiel» mort donc, puisque cet embryon de quatre cellules, votre jumeau, a été «sacrifié», dépossédé de son unicité au profit d'un double de votre père, alors qu'il avait été engendrée par vos parents, en même temps que vous, Céline. Maintenant vous devez me faire une promesse, où plutôt trois promesses : vous ne devez parler des origines de votre futur fils à personne ; vous devez partir de ce pays, votre mère ma laissé ce chéquier d'un compte anonyme d'une banque suisse, très garni et à votre nom, suffisamment pourvu pour vous entretenir vous et votre fils jusqu'à votre décès. Votre signature y est enregistrée et voilà les numéros de ce compte. Partez au Canada, en Amérique du sud, où vous voulez ; vous devrez envoyer cette enveloppe et cette serviette de toilette qui a servi pendant la transplantation de l'embryon, à Claude Chautard dont vous trouverez l'adresse inscrite sur l'enveloppe. Et, je vous en prie, ayez pitié de moi, appelez cet enfant «Théophile». C'est l'unique et dernière supplique que je fais à la fille de cet être que j'ai tant et tant aimé. Et n'emmenez jamais, quoi qu'il arrive, votre fils à la montagne. Adieu Céline.».
Le soir même, Théophile se noyait dans la Deule. Le lendemain, j'ai reçu chez moi un paquet anonyme où je trouvait cette serviette de toilette, quatre enveloppes, contenant chacune une lettre racontant toute cette histoire. La lettre de Caroline, celle de Théophile, celle de Céline et, une de Elmer. C'est une sorte de synthèse de ces quatre lettres, que l'on retrouve ici. Toutes ces péripéties sont plutôt incroyables, mais la présence de la dernière lettre est une énigme supplémentaire. Il y avait dans chacune de ces enveloppes, un billet de 50 euros.

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