(Métaphysique .
le fils)
Eddy ![]() |
le "Livre
de Eddy" en PDF
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C’est
Camille, un copain amateur de randonnées à vélo
qui m’a parlé de ces évènements
improbables. Il était, il y a pas mal d’années,
membre de l'amicale cyclo-touristique de Villeneuve-Saint-Georges.
Des randonnées étaient organisées, des rallyes,
parfois même des courses, jusqu’à ce dimanche de
mai 1994 où Eddy, au cours d’une ballade, s’arrêta
en haut d’une côte, posa son vélo contre un arbre
et s'assit sur l’herbe. Eddy était un cinquantenaire jovial, membre très actif de l’association depuis trente ans. En haut de sa côte, assis à côté de son vélo, il semblait en pleine extase. Sans un mot, il regardait la route. Des randonneurs s’arrêtèrent, lui demandèrent ce qu’il avait, s’il avait mal quelque part mais lui, gardait le silence avec toujours ce même sourire idiot. Mon copain était là. Certains parlaient déjà de prévenir le SAMU, les pompiers… Mais Eddy, à ce moment, se mit à parler, à enseigner, plutôt. Cela dura des heures. Certains furent convaincus, touchés par la grâce, d’autres pensèrent qu’il aurait du mettre son casque, au moins un chapeau, que le soleil tapait vraiment dur cet après-midi là. Il y en avait quelques-uns qui reniflaient sa gourde, à la recherche d’un toxique quelconque, pastis ou autres. Son discours incohérent pour les uns, transcendant pour d’autres, étonnait, en tous cas. Quelques jours plus tard, Eddy, le «Cycliste-devenu-Bouddha», créa l'Église du «Grand-Bi Univers-selle» Son enseignement reposait essentiellement sur le fait que les parties d’une bicyclette figuraient la structure parfaite d’une église puis d’une société céleste idéale. Le guidon : c’est le guide abstrait, aveugle et docile sur le cheminement de la grande randonnée. Les roues : ce sont à la fois les pièces qui soutiennent l’ensemble, le socle mobile, fuyant, et celles qui permettent par leur rotation, de rester droit, dans l’axe du centre de la terre. La fourche : elle assure le lien entre le guide aveugle et l’éternel retour, entre la destinée et le matérialisme. Le cadre : c’est la structure et permet la cohésion du tout, l’élément qui relit entre eux les parties «actives» de l’ensemble, y compris le pédalier qui assure la transmission de l’énergie et enfin, la raison d’être du vélo : la selle, l’écrin. De plus, la randonnée, le cheminement dans différents paysages, l’effort soutenu et régulier sont le sens même de la méditation. Les cyclistes sont des moines, des bonzes modestes qui se sous-estiment. Faire le «Paris-Roubaix» ou marcher sur l’eau relèvent de la même expérience spirituelle. Certains, une petite dizaine, choisirent de fonder avec Eddy, «l'Église du Grand-Bi Univers-selle» D’autres, dont mon copain, comprenant que Eddy avait définitivement pété un câble surent qu’ils devaient se chercher un autre club pour pouvoir continuer à faire leurs petites balades tranquilles du dimanche à vélo, sans tout ce fatras mystico-cycliste. Ce récit me parut tellement invraisemblable, inouï, que je suppliais Camille de me donner l’adresse de cette «Église» D’autant plus qu’il me dit que, par la suite, cette secte avait fusionné avec une autre, après le décès d’Eddy en 1997. Cette «Église», «l'Église de Gigi l’Amoroso», était l’ancien fan-club de Dalida de Joinville-le-Pont ! Non ! … Ça ne peut pas exister un truc pareil ! … Si. Je devais absolument aller voir ça. Une jeune femme me reçoit dans un petit appartement de la rue Alfred Gillet à Bonneuil-sur-Marne. Elle porte un cuissard ocre rouge et une épaisse perruque blonde. Il règne dans l’appartement une sorte de silence recueilli, de recueillement silencieux. Elle me conduit dans une pièce où m’attend un homme d’une trentaine d’années. Il est assis dans un fauteuil en plastique, derrière une table transparente. Lui aussi porte un cuissard de la même couleur. Il a sur la tête, un casque de cycliste bleu vif, d’où dépassent des cheveux faisant sans doute partie d’une perruque identique à celle que portait la fille qui m’a reçu. Les yeux fermés, il semble méditer. Bon, allez ça suffit là, j’arrête. Elle est vraiment trop allumée cette histoire. Oui, je sais, c’est amusant ce truc de disciple habillé en cycliste avec une perruque blonde. Mais ça va cinq minutes ! C’est trop outrancier, trop n’importe quoi ! Je vais me la faire plutôt «Église de scientologie fauchée» cette description. Donc, une jeune femme me reçoit dans un petit appartement de la rue Alfred Gillet à Bonneuil-sur-Marne. Elle porte un tailleur sombre, très strict. Les seuls signes ostentatoires, très discrets, sont un badge à l’effigie d’Eddy, un autre à celle de Gilbert (le «Cycliste-devenu-Bouddha» et «Frère Zoum-Zoum-Zoum») sur fond d’arrivée de course cycliste et une broche dorée représentant un grand Bi. Il règne dans l’appartement une sorte de silence recueilli, de recueillement silencieux. Elle me conduit dans une pièce où m’attend un homme d’une trentaine d’années. «Je vous présente frère Amor-Amor-Amor, Grand Maître de Draisienne du troisième Braquet» Elle met la main à plat sous son oreille gauche et dit «Parolé-Parolé-Parolé, frère Amor-Amor-Amor. Je vous amène ce monsieur intéressé par notre église.» Il pose sa main de la même façon et dit : «Parolé-Parolé-Parolé et merci sœur Itsi-bitsi-petit-bikini» Il est assis dans un fauteuil de résine, derrière une table transparente. Habillé tout en noir et les yeux fermés, il retourne dans sa méditation (ou son calcul mental) Ben voilà, ça va mieux comme ça. C’est encore assez largement grotesque mais avec une histoire pareille, c’est difficile d’être sérieux. Il relève enfin la tête après une bonne demi-heure. Je lui explique que je suis en recherche et que toute expérience spirituelle m’intéresse. Il me sourit avec l’air de sérénité de l’emploi. Il me rappelle que «l'Église du Grand-Bi Univers-selle» est devenue «l'Église du Grand-Bam-Bi-no Univers-selle/Unis-vers-Celle» après sa fusion avec «l'Église de Gigi L’amoroso» Il m’explique que j’arrive à un moment clé de la vie de l'Église. La conjonction astrale indique que le moment est venu. Celui de découvrir l’enfant, la réincarnation du «Dérailleur Lama» (Eddy) ou du «Dalida Lama» (c’est son autre nom, Dalida étant à la fois l’épouse céleste et un avatar d’Eddy) La méthode utilisée est de mettre en contact des enfants déjà sélectionnés avec des objets familiers ayant appartenu soit à Eddy, soit à Dalida. Le/la réincarné/e est sensé/e reconnaître des objets lui ayant appartenu dans sa vie antérieure, c’est à dire, 1° un mouchoir jeté par la diva à son public, 2° un body d’enfant porté par Eddy, le «Cycliste-devenu-Bouddha» quand il était petit. Ces objets, le mouchoir et le body, sont mêlés à d’autres objets. Une voiture de pompier, deux ou trois Game-Boy, des barbies, une couverture molletonnée, un GI Jo. Trois enfants sont là, deux garçons et une fille. Tous les membres de l'Église (8) sont présents également. Frère Zoum-Zoum-Zoum, un homme vigoureux de soixante cinq ans, fondateur avec son épouse, de «l'Église de Gigi L’amoroso» est celui qui a transcrit la Loi de Eddy, celui qui l’a consignée dans de saintes écritures, le prophète et l’initiateur. Il est parti faire le tour du monde en ascète, à bicyclette et avec la caisse de l'Église depuis maintenant plus de quatre ans. Un chant dont le texte a été révélé, par une vision, à frère Zoum-Zoum-Zoum, est entonné en chœur. La musique est difficilement identifiable. Ces gens ne chantent pas vraiment juste et leur extase n’arrange rien. Allez, un, deux… un, deux, trois, quatre ! … (pour les paroles, voir «le livre de Eddy») Frère Zoum-Zoum-Zoum, Gilbert, donc, est un monsieur rondouillard, toujours près à rigoler. Il est marié avec Agnès, la sœur de Eddy. Celle-ci adorait Dalida et, Gilbert et elle, ont créé, pour occuper leur pré-retraite puis leur retraite, un Fan-club de Dalida à Joinville-le-Pont. Gilbert qui se sentait encore très vert et bien installé dans sa petite soixantaine, espérait aussi pouvoir y faire des rencontres. Ils étaient 11 en 1990, 14 en 1991 mais seulement 5 en 1994. Peu de temps après la révélation de Eddy, Gilbert prétendit qu’il avait eu, lui aussi, des visions. Agnès aussi, mais elle était déjà sous neuroleptiques. Il y a des chances pour que les «révélations» de Gilbert soient un peu influencées par le relatif succès rencontré par Eddy et son culte du vélo. Il semblerait que Gilbert ait trouvé la place de gourou très à son goût. Gilbert s’est attribué la garde des pratiques et des rites de cette nouvelle Église devenue nécessaire au culte qui s’imposait de lui-même pour Dalida et qu’un simple «Fan-club» ne pouvait pas assurer. En novembre 1994, il a donc créé «l'Église de Gigi l’Amoroso» (ex-Fan-club de Dalida, donc, de Joinville-le-Pont) avec Agnès, son épouse, pas encore «retirée». A ce moment, «l'Église de Gigi l’Amoroso» a pu toucher plus de fidèles, attirés par le côté ésotérique pas compliqué et new age/branchouille du machin, des jeunes femmes aussi. Gilbert, à cette époque, s’est vraiment bien amusé. C’est lui le rapporteur par écrit des visions et vérités révélées. Étant le beau-frère de Eddy, le «Cycliste-devenu-Bouddha», c’est lui qui a œuvré pour la réunification de «l'Église de Gigi l’Amoroso» et de «l'Église du Grand-Bi Univers-selle», qui l’une comme l’autre, commençaient à être un peu trop désertées par le fidèles, pour devenir «l'Église du Grand-Bam-Bi-no Univers-selle/Unis-vers-Celle» dès 1998. Ça faisait, tout de suite, plus de monde et plus de trésorerie. C’est à ce moment que Gilbert est devenu «Frère Zoum-Zoum-Zoum», auto-proclamé «Grand Maître de la Petite Reine», chef suprême de l'Église depuis le décès du «Cycliste-devenu-Bouddha» Après cette incantation, le moment est venu pour que la réincarnation du Dérailleur Lama se manifeste dans sa capacité à retrouver le ou les objets qui ont été siens dans sa vie antérieure. Les garçons s’approprient les Games Boy, la fille prend une Barbie. Pas original. Il semblerait que le dérailleur/Dalida Lama ne soit pas parmi ces enfants. «Ceci ne peut être, s’écrit frère Amor-Amor-Amor, Il est parmi ces trois là, je le sais ! Et puis de toutes façons, ce sont les seuls mômes sélectionnés que leurs parents ont bien voulu nous confier ! …» C’est à dire les enfants de Sœur Il-faut-danser-reggae et le fils de frère Je-m'endors-dans-tes-bras. «Sœur Besame-mucho ! C’est vous qui avez ramené toutes ces saloperies ! C’était plutôt évident, non, que des gosses se précipiteraient sur ces inepties au lieu de choisir un vieux body ou un vague chiffon !» Le frère se jette à plat ventre : «Parolé-Parolé-Parolé ! Pardon, pardon, sublime Eddy, mille fois pardon à Toi, divine Dalida, je suis un misérable, je suis encore si loin de votre très haute sainteté, mes paroles ont pris le pouvoir sur mes pensées, j’ai insulté les reliques sacrées, pardon, pardon, pardon…» Après un bon quart d’heure de larmes et de lamentations collectives, le frère déclare, résigné : «Il nous faut remettre à demain la cérémonie de la renaissance. Sœur Besame-mucho, veillez à trouver d’autres objets moins attractifs à mêler aux reliques sacrées, s’il vous plaît, pour ma part, je vais jeûner, prier et veiller toute la nuit» Le lendemain, tous les adeptes sont là, les trois enfants aussi. Dans la salle, disposés sur le sol, outre le mouchoir et le body, Sœur Besame-mucho a disposé une machine à laver, une tondeuse à gazon, une poubelle garnie, et quelques poids en fonte de cinquante kilos. Après le chant sacré entonné avec ferveur, les gamins lâchés dans la salle, s’égayent en rigolant comme des fous. Bryan et Alexandra s’intéressent de très près à la tondeuse à gazon, quant à Kévin, il essaie de rentrer dans le tambour de la machine à laver. Frère Amor-Amor-Amor est blême. Il déclare solennellement : «Mes sœurs, mes frères, il faut être fort ! Cette épreuve nous est envoyée pour tester notre détermination. Il est certain que celui qui doit venir, revenir plutôt, est l’un de ces trois enfants. Allons à Auchan, acheter une série de bodys. Nous demanderons à chaque enfant d’en choisir un. Si le bon est choisi, tant mieux, sinon, nous tirerons au sort et puis voilà. Nous jetterons le reste aux ordures et puis c’est marre.» Le bon body a fini dans la poubelle, le mouchoir a été conservé comme relique sacrée, bientôt rejoint par le body tout neuf, choisi par Kévin finalement désigné comme la réincarnation du Dérailleur/Dalida Lama. D’ailleurs, étant donné l’âge de Eddy, j’aurai plutôt tendance à mettre en doute l’authenticité de la relique. Quand il était bébé, je ne crois pas que Eddy ai jamais été habillé avec ce genre de truc. ça n’existait probablement pas à l’époque et puis c’était la fin de la guerre, les pénuries... A moins qu’un soldat US ai distribué ça en même temps que des bas-nylon et du chewing-gum... Mouais... Ce truc aurait donc, au moins soixante ans ! Il ne fait vraiment pas son age. J’ai tout de même récupéré le vieux body pour en faire cette peinture. &&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&
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Le Livre de Eddy
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