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«León ! Allah Akbar»

Encore plus loin dans le temps et dans l’histoire, Léon Napakatbra a encore d’autres origines, réelles, profondes et singulières.

Elles sont décrites avec soins dans l’oeuvre du professeur Leopold Vandemeulenbrouck, chercheur à l’Université Royale de Namur de 1892 à 1904, spécialiste du Haut-Moyen-Âge et co-auteur avec Octavus Demaesmecker, Maître de conférence, de 1886 à 1888, à l’Université de Heidelberg, de cet indispensable ouvrage parus en 1908 : «Activités musicales et génie mécanique des populations d’Europe de l’ouest,au VI°, VII° et VIII° siècle».

Dans ce puits de connaissances, ils nous donnent des pistes sur une genèse encore plus lointaine, donc, de «Léon Napakatbra».

Citons cet ouvrage :

«... Au VII° siècle, la péninsule ibérique est occupée par les Maures. Lors de la chute de l’Empire romain au V° siècle, des barbares germaniques, les Suèves, les Vandales, les Wikipédias et les Wisigoths envahirent l’Espagne. Les Vandales, installés momentanément au sud de la péninsule passèrent rapidement en Tunisie, et les Wisigoths imposèrent leur loi jusqu’à la conquête musulmane.
Les Arabo-Berbères menés par Tariq ibn Ziyad conquirent le pays en 711. En 756, l’Espagne musulmane devint indépendante, sous le règne des Omeyyades d’Espagne.

Abd al-Aziz ibn Musa était un musulman sincère mais aussi un esthète et un érudit certain. Il possédait et régissait une grande plantation d’oliviers dans cette riche province appelée aujourd’hui : Castille-León. Il était grand amateur d’huile d’olives et grand amateur de Musique et de Science. Pour broyer les olives, il utilisait deux meules de pierre non polie. Celle du dessus, en entonnoir sur sa face supérieure, percée en son centre recueillait les fruits versés 
là en continu. (planche 1825)

               

(planche 220)
Elle était mue par quatre esclaves, la faisant tourner en poussant des barres de bois la traversant de part en part. L’autre meule, celle du dessous, fixe celle-ci, complétait le moulin. Les deux meules avaient des stries en spirale sur leur face interne . Par ce moyen, la purée d’olives concassées se retrouvait éjectée sur les bord. Elle était récupérée dans une rigole circulaire puis conduite vers le pressoir situé encore plus bas, en dessous du broyeur et de la rigole. Ce pressoir était actionné, lui aussi, par les quatre esclaves faisant tourner
la meule supérieure. L’huile obtenue était ensuite filtrée dans un même mouvement. Un axe, taillé dans un tronc d’arbre, traversait tout cet agencement, de haut en bas et, par un savant montage d’engrenages, faisait fonctionner toutes les parties de la machinee: arrivée en continu des olives, broyage, pressage, filtrage. C’est Abd al-Aziz ibn Musa, lui même, qui avait mis au point cet ingénieux système. Esthète, érudit, musicien et «ingénieur» aussi, semble-t-il !

Deux soldats munis de fouets, deux autres munis de baguettes avaient pour mission de rester à une place fixe, formant un carré autour du broyeur-pressoir et frappaient en cadence les esclaves lorsqu’ils passait devant eux. Le bruit continu du frottement de la pierre accompagné par les gémissements des esclaves, ponctué par le bruit sec et régulier des coups de fouets et de triques, rythmé par les cris des hommes sous la cruelle morsure des lanières de cuir tressé et des branches souples de noisetiers... accompagné par les grincements de la vis du pressoir... Tout cela formait une grille musicale très intéressante, très excitante et prometteuse.
Il était fier de sa machine qui produisait à la fois une musique divine et une huile d’olives unique. Cependant, Abd al-Aziz ibn Musa désirait toujours améliorer son oeuvre.
Comme dit plus haut, il y avait le bruit des olives tombant régulièrement dans de moulin, le frottement des meules, les grincements du pressoir, le ruissellement de l’huile, les gémissements et les cris des esclaves, les claquements secs et réguliers des fouet et des baguettes avec parfois, un esclave qui s’écroulait en poussant des râles, aussitôt enchaînés par les cris et les insultes des soldats, doublés de coups supplémentaires. Tout cela était très beau, très émouvant, musicalement très satisfaisant, déjà... De temps à autre un esclave mourrait et il fallait le remplacer... «Comme une corde de Oud qui se brise...», pensait distraitement Abd al-Aziz ibn Musa.
Cela donnait l’occasion à l’aimable assistance d’aller se rafraîchir. Et cela donna une nouvelle idée à Abd al-Aziz ibn Musa. Le rythme de la machine allait toujours en se ralentissant. C’était normal : la cadence générale était dictée par les esclaves ! C’était eux qui déterminait l’allure. En effet, les soldat armés de fouets ou de baguettes restait à leur poste. Donc, plus lentement les esclaves avançaient, moins ils prenaient de coups ! C’était certain ! C’était leur intérêt d’avancer lentement ! Alors, que faire ?!
Abd al-Aziz ibn Musa décida de se procurer un nouvel esclave :
un joueur de Oud, Abu Al-Hassan Ali ben Rafu dit Nafi.


(Pour le célèbre guitariste espagnol Paco de Lucía, l’inventeur de la guitare telle qu’on la connaît s’appelle Zyryab fils de Nafi, esclave-musicien joueur de Oud. Il a fondé une école de musique qui eut une influence considérable sur la musique arabo-andalouse.
Abu Al-Hassan Ali ben Nafi, dit aussi Ziriab - ou bien Zyriab ou Ziryab - né à Bagdad en 789 et mort à Cordoue en 857, était le fils de Abu Al-Hassan Ali ben Rafu dit Nafi, ayant joué du Oud pendant 18 années pour Abd al-Aziz ibn Musa, propriétaire terrien en Castille-León avant que celui-ci ne parte pour Bagdad. C’était un poète et musicien d’origine kurde... Il contribua imposer le Oud en Andalousie en y ajoutant une cinquième corde et en développant le jeu au plectre. Il fut non seulement un musicien extraordinaire, mais aussi un grand lettré, un astronome et un géographe)

Nafi jouait de son instrument debout sur la meule supérieure. Parfois, il tournait avec elle, d’autres fois, toujours en jouant, il marchait dans le sens inverse de la rotation, suivant les instruction de son maître. Abd al-Aziz ibn Musa s’imaginait qu’une musique entraînante, jouée avec un tempo imposé, forcerait les esclaves poussant les barres transversales à avancer régulièrement sans ralentir, jamais ! Mais il n’était pas satisfait. Les esclaves pousseurs n’avaient pas le sens du rythme ! Ah non, vraiment ! Abd al-Aziz ibn Musa n’était pas satisfait !
Son ami Abd al-Rahman, en visite protocolaire au Califat de Cordoue, souhaita voir son oliveraie et découvrir ses merveilleuses inventions dont la renommée lui était parvenue.
Il lui avait amené, en présent un lion. Il pensait, à juste titre, que son ami s’amuserait fort de voir dévorer des infidèles par ce fauve.
Pour Abd al-Aziz ibn Musa, ce lion furieux, rugissant, se débattant, fut «le» déclic. Il vit en un éclair l’ultime finalisation de son travail, la résolution technique parfaite de tous ses soucis et la sublimation sur-réelle qui allait transformer son grand oeuvre en Chef-d’Oeuvre unique et magnifique.

À huit mètres du centre du moulin fut planté un mat auquel était fixée une poulie. Une chaîne de seize mètres passait dans cette poulie. Une des extrémités était attachée au collier de fer du lion. L’autre, s’enroulait autour d’un cylindre de métal entourant la partie supérieure de l’axe du moulin. À la base de ce cylindre (planche 499) se trouvait une roue «crantée» annonciatrice, en quelques sortes, du dérailleur de bicyclette (né seulement douze siècles plus tard !), qui soit le bloquait, le rendait solidaire de l’axe, 
soit le laissait librement tourner.

(planche 68A)

(planche 68B)

(planche 68C)

Tout dépendait de l’impulsion donnée au cylindre.

Une simple barre de bois dur était reliée par une extrémité à la base du cylindre, le soulevant et débloquant l’engrenage d’un cran, par simple pression dans le sens inverse de la rotation de la meule. L’autre extrémité était prolongée par le Oud, solidaire de la barre.
(planche 5801)
Sans pression sur la barre pour débloquer le cylindre, celle-ci tournait du même mouvement que la meule et entraînait l’enroulement de la chaîne qui tirait le lion en arrière.


(planche 611)
Quand le fauve furieux, tirant sur sa chaîne pour aller attaquer les esclaves pousseurs, était tirée vers l’arrière, une autre corde, solidaire de ce mouvement, munie d’un noeud coulant et enserrant le cou du musicien, était tirée vers le haut.
(planche 3037)
En poussant la barre solidaire du oud et de la pièce centrale crantée du moulin, il soulevait cette dernière qui passait à la position suivante du plot fixée à la meule. Il libérait d’un cran la chaîne qui retenait le lion et relâchait d’autant la corde qui l’étranglait.

Un tempo réglable, déterminé et précis était donné par la chute régulière d’olives dans l’appareil. Avant d’être précipitée dans le broyeur, elles rebondissaient sur une cymbale.
(planche776)
Le reste des olives arrivait
 dans la machine
 par un autre conduit, plus large et produisait
 une sorte de roulement de tambour continu.
   
Imaginons cet ensemble savant en marche !

   
Un amphithéâtre avait été construit pour que les invités de Abd al-Aziz ibn Musa, choisis avec soins pour leur sens aigu de l’esthétique et pour leurs goûts musicaux «modernes», puissent assister à ce concert-spectacle dans le confort le plus absolu. Des rafraîchissements leur étaient servis.
Des olives tombaient rythmiquement sur la cymbale. Nafi, la corde au cou, se mettait à jouer. Les esclaves faisait tourner l’ensemble. Ils devaient pousser régulièrement et suffisamment rapidement pour tirer le lion en arrière. Ils sentaient l’haleine du fauve, ses rugissements et ses coups de griffes brassant l’air, à moins d’une coudée de leur peau brûlée et meurtrie. Nafi, pour ne pas être étranglé, devait avancer, lui aussi, régulièrement en jouant et en entraînant le Oud, solidaire de la barre reliée à l’axe, permettant ainsi au lion de tirer sur sa chaîne mais ce relâchant un peu la tension de la corde autour de son cou.
Les esclaves avaient enfin le sens du rythme !!
Ils devaient tous, le musicien comme les pousseurs, absolument suivre le «tempo de l’olive». S’ils poussaient trop vite, le musicien se retrouvait pendu et les pousseurs étaient immédiatement décapités. S’ils poussaient trop lentement, ils étaient attaqués par le lion. Les pousseurs éloignaient le lion en tournant la meule, mais leurs vies dépendaient aussi de celle du musicien qui pour ne pas être pendu, devait constamment rapprocher le lion en actionnant le cylindre central. Les esclaves enchaînés aux barres, poussaient sans relâche pour survivre et, toujours pour survivre, devaient veiller à la santé du musicien, celui là même, qui les entraînait vers la mort.
     
Comme cela était beau ! Comme cela reflétait bien la tragédie et la fragilité de la condition humaine ! Et cette musique, si triste ! Et si belle ! C’était la musique des anges ! C’était la musique de Dieu ! La musique de Allah ! Du Dieu unique !
Au bord des larmes, débordé par tant d’émotions esthétiques, Abd al-Aziz ibn Musa ne pu s’empêcher de pousser ce cri «... LEÓN ! ALLAH AKBAR !» (qui pourrait être traduit de l’arabe par «Voyez ce lion ! Dieu est (le) plus grand»)
Bien sûr de temps à autres, un esclave trébuchait, ralentissant dangereusement la marche de l’ensemble, et rapprochant inexorablement le fauve affamé et sur-excité qui tirait d’autant plus énergiquement sur sa chaîne, qui finissait par atteindre un des pousseurs, ce qui ralentissait encore la marche de la meule. Le musicien, sous peine d’être empalé, ne devait jamais cessé de jouer du oud et de marcher. La chaîne était rallongée d’autant, le lion pouvait avancer et les esclaves pousseurs étaient dévorés. Toujours au son de la musique.

En cas de décès accidentel des esclaves pousseurs, le musicien n’était jamais inquiété. C’est ainsi que Nafi survécue dix-huit ans, toujours en jouant sur la meule. Quel santé ! Jusqu’au jour ou Abd al-Aziz ibn Musa, en visite chez le Sultan de Bagdad et ayant vu, à sa sortie du navire, se briser les mille fiasques d’huile d’olives qu’il avait prévu de lui offrir, remplaça, au dernier moment et, ô combien, de mauvaise grâce, son cadeau au Sultan, par Nafi (regrettant vraiment la perte de ce sujet si précieux). Il y a de fortes chances pour que le nom de la ville de «León» trouve son origine dans celui de cette magnifique machine...»

fin de citation

léon napakatbra
XXI°
edgar scoliose
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raymond, ramasse pas ça
XI
CLAUDE CHAUTARD
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métalu à chahuter
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sources
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les combat d'abatka
XV°
sources
VII°
O


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